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Comme nous avons de plus en plus de nouveaux lecteurs, j’ai pensé présenter à nouveau Hu- bert Gagnon un des premiers bâtisseurs de la paroisse, père de Émile Gagnon, premier maire de Saint-Narcisse, de février à avril 1922.

Colon à nul autre pareil, rude travailleur, homme sans culture intellectuelle mais savant dans les choses de Dieu, Hubert Gagnon, rentier à 60 ans, habitait une spacieuse maison à Beausé- jour. Il avait établi ses six fils Adhémar, Eugène, Émile, Alfred, Jacques et Joseph. Deux de ses filles étaient religieuses et l'autre se destinait au mariage. Il avait de quoi vivre le reste de ses jours sans travailler. Mais un seul hiver inactif et sans responsabilité réveilla dans son es- prit la nostalgie de la terre.

Il se rendit bien des fois au bureau des Terres de la Couronne et au printemps 1897, on apprit que Hubert Gagnon avait acheté neuf lots de forêt vierge de cent acres chacun à 15 milles des dernières maison de Ste-Blandine, au Fonds d'Ormes, dans le canton Macpès. Il se plaisait à dire qu'il travaillait à l'établissement de ses petits-fils. À maintes reprises, il avait exploré ce «fonds d'ormes» dont il connaissait la capacité et la fertilité et empêcherait ainsi nos jeunes gens d'émigrer aux États-Unis.

C'est avec une rare persévérance qu'il recommence, à 60 ans et en pleine forêt, la vie de colon. Il arrache les souches, les brûle. Il fait de la terre neuve. Il ensemence, il récolte, il défriche en moyenne 60 arpents par année. Cela dure 15 ans. Quand les neuf cents acres primitifs sont défrichés et tous bons à la culture, Hubert a 75 ans; il revient au foyer et partage ses richesses nouvelles entre ses six fils qui héritent de cet incomparable père colon de onze cent quatre- vingts acres de terre faite de ses mains.

Il se trouvait bien payé de ses peines quand il récoltait sur son fonds d'ormes huit à neuf cents minots d'avoine et des milliers de bottes de foin. Il fut très heureux quand sa femme, Julie Pa- rent, consentit à s'exiler avec lui au fond de la forêt pour une couple de mois d'hiver. Pour égayer sa solitude, elle amenait avec elle un petit-fils. Un portrait de cette époque où est repré- senté Hubert Gagnon avec sa femme, son petit-fils Séraphin et le gros chien «Boule» est d'ail- leurs dans la sacristie de l'église de St-Narcisse. Plus tard, paraît-il, il regardait souvent ce por- trait et avec un accent de regret disait: «Ah! c'était le beau temps alors».

En 1922, Eugène Gagnon possédait le lot 39E au rang 4, canton Macpès avec une superficie de 50 acres et dont l'évaluation était de 30 $. Quant à Jacques, étaient inscrits à son nom les lots suivants du Rang 5, canton Macpès: lot 36, 50 acres, évaluation 1 200 $; lot 37, 50 acres, évaluation 500 $ et lot 38, scierie évaluée à 2 000 $.

Hubert Gagnon s'est éteint en 1924, à l'âge de 86 ans. Un hommage lui fut rendu par le doc- teur Joseph Gauvreau, le 1er septembre 1927 dans l'Action Catholique. Voilà un bien court résumé d'une époque dans la vie d'Hubert Gagnon.